Sociétaire renommé de la Comédie-Française, Benjamin Lavernhe a depuis fait ses armes au cinéma. On le redécouvre dans un rôle aussi intense que flamboyant : l’abbé Pierre, figure majeure du XXe siècle. L’occasion de s’entretenir avec un artiste engagé corps et âme, au service d’un projet qui le voit vieillir sur plusieurs décennies.

Qu’est-ce qui vous a poussé à accepter un rôle aussi intimidant, de prime abord ?

Benjamin Lavernhe : Autant le biopic me passionne, autant les tentatives ne sont pas toujours réussies. C’est toujours une trahison, puisqu’il faut résumer une vie en deux heures. Mais après lecture du script, j’ai réalisé à quel point la promesse était hallucinante. J’avais envie de parler pour lui, de dire ses mots. Et puis l’abbé Pierre étant lui aussi un acteur, le texte était d’une grande théâtralité. J’ai senti que la collaboration avec Frédéric Tellier ne serait pas verticale, qu’il m’impliquerait dans le processus de création et qu’il écouterait mes remarques. Pour toutes ces raisons, je me suis dit que ce serait une bouleversante aventure humaine...

En quoi a consisté la préparation, pour un rôle aussi vertigineux ?

Frédéric avait tout lu, tout vu de l’abbé Pierre. Il m’a donné les livres essentiels ainsi qu’un dossier dématérialisé de milliers d’archives, toutes époques confondues. On s’est aussi déplacé avec lui et Emmanuelle Bercot, qui interprète sa secrétaire Lucie Coutaz, au contact des compagnons d’Emmaüs et même jusqu’à Assise en Italie. C’est ce voyage qui a changé sa vie, lorsqu’il avait 15 ans. Son dernier secrétaire particulier s’est confié, j’y ai découvert le pan romanesque de sa personnalité : ses chagrins, son hypersensibilité, son ambition. Si sa vie était une fiction, on n’y croirait pas !

En tant qu'acteur, comment absorbe-t-on une si grande quantité de matière vivante et historique ?

Au casting, je suis allé loin dans le mimétisme. Je voulais prouver que j'en étais capable, pour ensuite le réfréner pendant le tournage. J’ai voulu plonger dans sa vérité, y compris physique : plus je vieillissais à l’écran, plus je m’abaissais au point de courber le dos en permanence ! (Rires.) L’abbé Pierre n’était pas surplombant. Quand il vieillit, il fend la foule et il observe les gens par en dessous. Et puis c’est le maquillage qui m’a guidé vers le mimétisme, où je me suis autorisé à revenir aux propositions du casting : c’est-à-dire retrouver sa musicalité, ses tics. Aussi parce que sa voix nous manque, comme le dit si bien Frédéric. J’éprouvais beaucoup d’admiration pour lui, mais surtout un manque. Ce film existe pour le combler un peu.

La phase de vieillissement est impressionnante. Comment supporter un tel maquillage, qui peut s'avérer lourd à porter ?

Lorsqu’on porte un masque, notre peau ne respire plus et nos yeux s’assèchent. Ils sont comme englobés par une lentille, qui nous dépossède. Or, on a tous une mémoire physique de l’émotion : les yeux mouillés, la peau qui rougit... Cette mémoire entravée, je me sentais vide. Quand on m’enlevait les lentilles, c’est comme si mon corps trouvait enfin une porte de sortie : mes yeux piquaient, je partais immédiatement en sanglots ! C’est vrai, c’est abstrait de penser à des choses tristes pour pleurer au cinéma; moi, je me frotte le visage pour faire frémir ma peau et humidifier mes yeux. L’émotion jaillit, car mon corps retrouve cette mémoire-là. C’est très technique, je l’ai découvert grâce à ce film. Mais j’ai adoré jouer la vieillesse ; je pensais à mes grands-parents et toutes ces personnes âgées qu’on observe, c’était très touchant.

Qu'est ce qui vous semblait primordial dans le fait de ressusciter l'Abbé ierre aujourd'hui, en 2023 ?

Ce film pose aussi une question de cinéma : comment renouveler un regard sur une situation que tout le monde côtoie, celle de l’extrême précarité ? Raconter l’abbé Pierre, c’est raconter à quel point son discours reste inspirant pour la jeunesse, comme pour ce môme de 11 ans qui m’a dit: "Plus tard, je veux faire abbé Pierre." Faire ce film, c’est dire qu’on peut changer les choses malgré l’actualité plombante. C’est transmettre un message d’espoir, quand l’abbé était un phare dans la nuit de son époque.

Cette interview est issue du Mag by UGC.

L'Abbé Pierre - Une vie de combats, un film labellisé UGC Spectateurs, à découvrir actuellement dans nos cinémas.

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