Tiré de l’histoire vraie de la lanceuse d’alerte Maureen Kearney, ce thriller inclassable de Jean-Paul Salomé (La Daronne) interroge sur le bafouement de la parole des femmes. Et offre un nouveau rôle trouble et ambitieux à l’impériale Isabelle Huppert. Rencontre.

Qu’avez-vous ressenti à l’idée d’incarner Maureen Kearney, un personnage réel ?

Isabelle Huppert : Le fait qu’elle existe a eu peu d’incidence sur mon désir de la jouer. Encore que, son apparence physique m’a beaucoup inspirée... Avec Jean-Paul [Salomé] et sa costumière, on a compris qu’elle constituerait une belle manière d’entrer dans la fiction. C’est paradoxal, car c’est comme si Maureen s’était créé une entité fictionnelle. On retrouve chez elle une certaine mythologie cinématographique : la blondeur hitchcockienne, le chignon, le rouge à lèvres... On peut penser qu’elle s’est inventé un look pour s’identifier à un monde qui n’est pas tout à fait le sien : celui de la politique, des puissants qu’elle côtoyait. Mais je ne crois pas que ce soit uniquement le cas, puisqu’elle est restée la même depuis. C’est quelque chose qui lui appartient. Toujours est-il qu’une fois ce cadre posé, je n’ai pas eu besoin d’aller plus loin dans la quête d’authenticité.

Certains acteurs veulent tout connaître de leur personnage avant de l’incarner, or l’affaire Maureen Kearney est faite de zones d’ombre.

J’ai d’abord lu le livre [La Syndicaliste, publié en 2019, ndlr] que Caroline Michel-Aguirre a consacré à l’affaire et j’ai fantasmé à partir de ce matériau, portée par l’aspect romanesque de cette double peine. On considérait qu’elle n’avait pas réagi comme la "bonne victime", donc il fallait que je reste un peu indéchiffrable. Le film souligne d’ailleurs son propre rapport à la fiction, puisqu’elle lit beaucoup et surligne des passages de romans. Ce comportement a suscité bien des soupçons...

La mise en scène questionne notre point de vue quant à la franchise de Maureen. Qu’est-ce que cela vous imposait, en termes de jeu ?

La mise en scène m’a beaucoup aidée. Si vous prenez les confrontations de Maureen avec l ’adjudantchef Brémont [campé par Pierre Deladonchamps, ndlr], elles traduisent bien toute l’horreur de la situation : à partir du moment où il a décidé qu’il ne la croirait pas, tout est sujet à suspicion dans son attitude. Quoi qu’elle fasse. Elle est comme prise dans une chausse-trape, un piège qui se referme lentement sur elle.

Vos plus grands rôles riment souvent avec des personnages ambigus. D’après vous, qu’est-ce qui pousse les cinéastes à vous projeter dans ces personnages-là ?

Qu’est-ce qui fait que j’ai envie de les faire, aussi... Ça touche à des choses très personnelles. Au fond, un acteur se joue beaucoup plus lui-même qu’on ne croit. Il est vu à travers des fictions, mais il répète des motifs qui lui appartiennent. Certains rôles sont plus composés, comme celui que je tiens dans Mon crime de François Ozon. C’est passionnant lorsque c’est les deux : mon rôle dans La Syndicaliste reste une composition, et en même temps, il subsiste un endroit où l’on sort de la fabrication.

Compare-t-on souvent ce rôle-ci à celui que vous teniez en 2016 dans Elle, de Paul Verhoeven ?

Oui, souvent. Pour parler en termes psychiatriques, on peut faire le lien vis à vis de la dissociation du personnage face au viol qu’elle subit. Mais les deux films sont très différents, car dans Elle l’héroïne a une totale maîtrise sur les choses. Elle s’érige en justicière, sans qu’il soit question de culpabilité. Dans le cas de Maureen Kearney, elle passe en revanche de victime à coupable.

Après avoir tourné tant de fois, quels sont les rituels de tournage qui vous paraissent essentiels ?

Les rituels, il y en a. Je dirais qu’ ils consistent à se créer une sorte d’espace imaginaire autour de soi. C’est comme si l’on se trouvait dans un cercle, celui de la fiction. Or, si quelqu’un le traverse malencontreusement, on pourrait le tuer ! (Rires.) Je plaisante, mais cela peut déranger. Jouer, c’est se placer dans un conditionnement mental très puissant. Il vaut donc mieux éviter les interférences. C’est peut-être d’ailleurs ce conditionnement qu’on cherche d’un jour à l’autre, d’un film à l’autre.

Cette interveiw est issue du Mag by UGC.

La Syndicaliste, à découvrir actuellement dans nos cinémas. Ce film a reçu le label UGC M.

 

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